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    “Everyone agrees with free speech until they hear something they don’t like.”

    — Ricky Gervais

Etre consultant en ESN (les Pours et Contres)

(Temps de lecture : environ 10 min)

J’ai travaillé plus de 4 ans en ESN en tant que consultant digital senior.

Si vous êtes intéressé par ce type de post, voici un billet qui vous permettra de vous éclairer sur les coulisses.

Forcément, il y a beaucoup de choses positives, mais je ne peux pas cacher que c’est un milieu et un fonctionnement inhabituel par rapport à une entreprise traditionnelle.

Le billet ci-dessous permet d’avertir mais aussi pour que je puisse fermer un chapitre de ma vie.

Les Pours : Salaire garanti

En comparaison avec certains métiers, notamment de profession libérale, freelance ou l’entrepreneuriat où le salaire n’est pas forcément garanti à la fin de chaque mois, que l’employé soit “staffé” (staffé = où l’employé facture un client pour une prestation) ou pas, il est payé.

Et clairement, pour avoir vécu des mois compliqués quand j’avais lancé ma propre agence de Com/ Mkg, toucher un salaire mensuel est une véritable bénédiction (surtout quand on a une famille à nourrir).

Les Pours : L’équipe

J’ai eu une chance d’avoir travaillé et fait la connaissance (et lié d’amitié) de nombreux collègues. Tous aussi intelligents, drôles, bienveillants et compétents les uns que les autres. Beaucoup me manqueront !

Les Pours : Des missions variées et l’accès à de grands comptes

J’ai été embauché à la base pour faire du design thinking. Mais durant les 4 ans passés en ESN, j’ai effectué peu de missions de design thinking (à mon goût). En effet, les missions ne tombent pas tout cuit. Il faut aller les chercher. Et si les missions ne tombent pas, il faut être rentable quoiqu’il en soit donc accepter des missions qui ne sont pas le coeur de notre métier, ni de nos compétences.

Quels sont les avantages à cela ?

On apprend à se débrouiller, à ne pas se reposer sur nos lauriers. On apprend à s’autoformer sur des compétences et des sujets. Certes, on n’est jamais dans notre zone de confort, mais ça a beaucoup de bon.

De ce fait, cela permet de faire beaucoup de choses. Beaucoup de missions variées pour lesquelles on aurait jamais soupçonné en être capable.

De plus, si l’ESN a pignon sur rue, des comptes clés négocient des contrats avec des grands groupes qui permettent de faire des missions encore plus intéressantes

Les Contres : Des missions en plan D

Mais forcément, être constamment en dehors de sa zone de confort peut aussi peser lourd sur la confiance en soi, sur sa raison d’être, sur le moral et le stress.

Ce qui peut accentuer le fameux syndrome de l’imposteur que tellement d’employés peuvent vivre.

Il m’était déjà arrivé d’avoir eu des crises d’angoisses la veille de présentation sur des sujets que je n’avais jamais abordés. Une crainte totale d’être démasqué dans des missions où j’apprenais au fur et à mesure les choses.

Donc, il faut faire preuve de beaucoup de comédie et théâtraliser sa prestation pour s’imposer en tant qu’autorité sur un sujet sur lequel nous n’avons jamais travaillé.

Et demain, c’est pour cette raison, en tant que client, je ne ferais jamais à faire à une ESN, ou du moins, je challengerai sévèrement la réelle expertise du consultant avant de le choisir en tant que prestataire (car il y a tout de même de très bons consultants ou qui sont devenus très bons avec le temps et l’expérience).

Les Contres : Le CRA

C’est quoi le CRA ? Je me souviens plus ce que l’acronyme signifie, mais je peux vous dire ce que c’est.

C’est un logiciel où chaque employé renseigne son temps passé à travailler, heure par heure. Normalement, un employé est censé remplir le temps passé à la fin de chaque semaine et l’envoyer à son N+1.

Le CRA permet à l’ESN de :

  • Facturer le client : A la base, le CRA répond à cet objectif premier qu’est celui de pouvoir alléger la comptabilité. Je déclare avoir travaillé 3 jours pour l’entreprise X, donc en un clic, l’ESN envoie la facture des 3 jours travaillés directement à la comptabilité de l’entreprise X.
  • Surveiller la productivité de l’employé : Forcément l’ESN paie son employé tous les mois, donc elle considère qu’il est normal de monitorer si ce dernier est rentable pour l’entreprise ou non.
  • Prévoir la disponibilité des employés : Aujourd’hui, il faut remplir le CRA plus d’un mois par avance afin que le management puisse effectuer des projections en CA, mais aussi pour staffer des employés sur de futures missions.

Le problème avec le CRA :

Si on veut souffler ou ne serait-ce que s’autoformer ou aider un collègue, un employé doit se débrouiller pour prévoir suffisamment de temps passé à effectuer le travail auprès de son client afin qu’il puisse se dégager du temps.

En gros, l’employé gonfle le nombre de jours volontairement pour prévoir du surplus.

Et pour une ESN, il est hors de question de prévoir du temps libre ou/ et d’être en “Intercontrat” (c’est-à-dire ne pas facturer de clients).

Et si jamais tel a été le cas, l’employé doit user son énergie à expliquer le pourquoi du comment auprès de son manager.

Les Contres : Les Yakafaucons

Selon le management ou certains individus ayant de l’autorité et du pouvoir, les missions peuvent se dérouler de façon relativement frustrante.

Il m’est déjà arrivé à de nombreuses reprises d’être victime de ce que j’appelle les Yakafaucons.

C’est quoi un Yakafaucon ?

Yakafaucun signifie de façon familière “Y’a qu’à faire, il faut qu’on fasse”. En gros, c’est quelqu’un qui a de belles intentions mais lorsqu’il s’agit d’exécuter, il y a plus personne.

C’est le manager ou quelqu’un dans la mission qui a du pouvoir qui va vendre du rêve à un client et promettre la lune sans même se poser la question sur combien de temps cela va prendre. Car ce dernier ne sait pas l’exécuter, n’a jamais l’exécuter et ne l’exécutera jamais car il part du principe que de part son statut hiérarchique, il n’a pas à le faire.

Et à titre perso, je déteste ça, car tout bonnement, cela déçoit.

Le client se rend vite compte du bullshit. Le Yakafaucon se met en conflit avec l’exécutant et essaie d’exercer son pouvoir dessus… Bref, c’est mauvais et à fuir.

Les Contres : Argent et économie à tout prix

Il y a une tendance générale, un ton environnant au sein de la plupart des ESN où l’argent est le nerf de la guerre. Certes, c’est le cas pour toutes les entreprises.

Mais parfois, un employé a tendance à sentir que la pression pyramidale vécue par son hiérarchie en quête de profits à tout prix. Le bien-être de l’employé et le travail effectué pour le client ont une fâcheuse tendance à passer après.

On peut comparer cela à l’ambiance du monde des GMS (grandes et moyennes surfaces), qui n’est pas connue pour être la plus tendre.

Il faut également se préparer à une ambiance d’économie à tout prix.

  • Forfait tél pour rester en relation avec le client ? C’est de la poche de l’employé.
  • Un mobile digne de ce nom pour montrer une réalisation ? C’est de la poche de l’employé

Heureusement que l’ESN fournit un matériel informatique de base (un PC portable fonctionnel), mais si on veut quelque chose de plus puissant comme un macbook, c’est beaucoup plus compliqué (or, il s’agit d’un outil de travail et non du matériel pour s’amuser).

Les évènements restent rares en général. Les sorties en mode team building sont bi-annuels (d’après mon vécu), et il s’agit souvent juste d’un rassemblement autour d’un repas.

Les Pours : Time is money

Encore une fois, ne perdons pas de vue qu’une ESN a pour objectif de gagner de l’argent et dégager du projet comme toute entreprise viable.

Et cette gestion force parfois une discipline positive sur sa manière de travailler. En effet, on se rend compte que le temps est important et qu’il faut bien la gérer. Cela force à tacler le trait éventuel de procrastination à un employé.

Cela fait un peu “Bootcamp militaire” mais ce n’est pas tout mauvais, au contraire. Ca forge. 💪💪💪

Les Contres : La concurrence en interne et dans le groupe

Si un employé est peu staffé, il connait forcément une pression par son manager qui veut qu’il rende des comptes. De ce fait, l’idée c’est de rester dans les bons carnets de son manager et proposer son temps sur des missions.

Sauf que si 2 employés ont les mêmes compétences pour une seule mission, ils deviennent concurrents entre eux.

Conséquences ? Oui, il faut promouvoir les bonnes relations entre collègues en interne mais parfois, il y a un ton particulier qui est généré à cause de ce système.

Et c’est encore pire entre agences régionales.

Par exemple, j’avais été missionné sur un projet d’UX et l’agence de Paris a rappelé le client pour lui convaincre qu’il y avait mieux que moi et moins cher.

Tous les commerciaux se trouvent à Paris donc certains CV parisiens sont priorisés par rapport à d’autres…

Bref, c’est particulier.

Les Contres : Les salaires (relativement) élevés

Il faut savoir si un employé se place sur un projet, on va calculer ce que l’on appelle ton TJM (Taux Journalier Moyen) et l’ajouter au coût final de la prestation vendue au client.

Si un employé gagne beaucoup en salaire, son TJM sera plus élevé. A savoir que l’ESN doit marger sur la prestation réalisée par l’employé (c’est le coeur de son CA réalisé).

Conséquences :

  • Si l’employé est en concurrence avec un autre qui gagne moins que lui, on va prioriser celui qui gagne moins car l’ESN pourra dégager plus de marge, mais aussi être plus compétitif au niveau tarif pour un appel d’offre (AO).
  • Toujours dans un esprit de rentabilité et de compétitivité, l’employé devra parfois effectuer la mission en moins de temps dont il aura réellement besoin (ou ne pas pouvoir prévoir de marge de contingence). Ce qui fait augmenter le stress et l’exigence du résultat encore plus.

Les Contres : Le double client

Quand j’étais en mission, j’avais parfois le sentiment d’avoir 2 clients au lieu d’un.

Je devais servir et livrer un travail pour mon client final, mais aussi j’avais la pression du chiffre et temps passé sur la mission ce qui apportait d’avantages de stress et de contrariété (en plus des tâches administratives propres à l’ESN).

Il arrive souvent d’avoir un directeur ou chef de projet qui surveille le temps passé et la rentabilité du projet. Bien entendu, ce chef de projet a lui aussi des contraintes auprès de sa propre hiérarchie.

Il m’est déjà arrivé de devoir déclarer plus de temps passé sur mon CRA car mon manager hiérarchique considérait que ce n’était pas suffisant et de me voir refuser l’acceptation de mon CRA car le manager du projet considérait que je facturais trop.

Cela représente énormément de dépenses énergétiques inutiles à mon avis.

Les Contres : La vraie vie de l’employé

Aucun employé travaille 7 heures d’affilé. Il est humain de prendre des pauses et d’avoir des jours où l’on se sent “pas dans le match” pour X raisons.

Sauf qu’en ESN, nous devons déclarer précisément ce qu’on a fait dans le CRA. Et donc du coup, si jamais notre semaine est moins productive, cela génère le stress de devoir se justifier auprès de son manager…

  • Damian Hazlewood

    Insatiablement curieux

    Passionné d'UX, de design de produit (notamment numérique mais pas que... glace8.com), de marketing/ comm, de nouvelles technologies, d'innovation, de comportementalisme, de psychologie, de neuroscience, de tout-ce-qui-geek, de concepts fous, de comédies US/UK (movies + standup), de films/ séries (+ scénarios), de musique, de créativité, et de fooding...

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